Médiation informationnelle

CONTEXTE

  1. Des besoins d’innovation dans le système éducatif thaïlandais – perspective de l’ouverture des frontières de l’ASEAN et d’échanges universitaires francophones

Selon les volontés exprimées au 21ème Sommet de l’ASEAN qui s’est tenu à Phnom Penh le 18 novembre 2012, les dix pays (Birmanie, Thaïlande, Cambodge, Laos, Vietnam, Singapour, Malaisie, Brunei, Indonésie et Philippines) membres de l’association des nations d’Asie du Sud-Est dont plusieurs appartiennent à la Francophonie formeront un ensemble communautaire réel en décembre 2015. Avec cet espace dynamique vont se créer des synergies éducatives permettant des échanges universitaires de plus en plus nombreux. Or, nous constatons déjà dans cette communauté en proche devenir des écarts entre ceux qui ont économiquement les ressources nécessaires pour offrir à leur système éducatif un environnement d’apprentissage qui intègre les technologies, que ce soit au niveau du matériel (salles informatisées, généralisation de l’épiscope et de la projection sur écran ; tableau numérique interactif, Internet sur Wifi, tablette etc.) que du logiciel (systématisation des présentations informatisées, utilisation de plateformes d’apprentissage dédiés, Internet…). Mais quelle est la pédagogie et quels sont les pédagogues capables aujourd’hui de les intégrer véritablement dans leur enseignement quotidien ? La Thaïlande a pour sa part fait distribuer des tablettes dans tous les lycées mais en oubliant que les professeurs des lycées et de collèges n’avaient pour certains même pas d’ordinateurs à la maison ou un poste informatique partagé pour 10… Par ailleurs, le paradigme d’enseignement fondamentalement ancré dans le tissu éducatif thaïlandais qui définit des notions telles que l’acquisition de connaissances, la mémorisation ou l’accumulation d’informations s’oppose fortement au paradigme d’apprentissage  qui propose un développement de compétences, une création de relations, une transformation d’informations en connaissances viables (Tardif, 1998). Quelle place et dans quelle mesure alors faire intégrer un réseau social au sein d’un enseignement afin de développer un apprentissage ?

  1. Des réseaux sociaux qui sont détournés

Dans les années 1990 sort un livre retentissant aux États-Unis sur le déclin de la sociabilité et le délitement du lien social  qui utilise de nombreuses données sur l’évolution des relations sociales aux États-Unis (Robert D. Putnam Bowling Alone 2000). Ainsi une enquête menée sur un échantillon représentatif de 5 000 Américains suivis pendant 20 ans montrent qu’en 2003 les Américains n’avaient plus en moyenne que 4 contacts sociaux proches, dont 2 amis et 2 personnes du cercle familial, alors qu’ils étaient 6, vingt ans plus tôt. En juillet 2010, 10 ans plus tard, il y avait environ 500 millions d’utilisateurs dans le monde pour ce réseau en particulier, dont plus de 100 millions d’Américains et 17 millions de Français, chacun ayant une moyenne de 130 « amis ».  Au-delà du nombre de 150, Dunbar, professeur d’anthropologie évolutionnaire à Oxford, nous affirme que « c’est le nombre maximum d’amitiés que l’esprit humain est capable de soutenir. Le nombre de Dunbar – tel qu’il est connu – s’applique de même à la génération Facebook. »

On ne parle plus de déclin de la sociabilité, mais au contraire de l’avènement d’une nouvelle sociabilité, profondément transformée et renouvelée.  Le paradoxe du développement technique de la communication humaine planétaire semble réduire considérablement les échanges réticulaires, mais augmente considérablement les échanges écrits puisque par Internet et la télévision, une autre personne est en “contact” avec celui qui se trouve à l’autre bout de la planète. Pour Pierre Merklé  « Le panorama des nouveaux usages relationnels invite plutôt à considérer qu’Internet, qui en cela est bien une technologie, accompagne,  plutôt qu’il ne cause, un certain nombre de ces transformations des relations sociales (affaiblissement des liens, transformation de la notion de groupe, horizontalisation et informalisation des relations…). » Les réseaux sociaux peuvent alors s’imposer comme une sorte de sociabilité compensatoire ancrée à un apprentissage de la langue.

  1. Des réseaux dédiés apparaissent, intégrant les outils inhérents aux plateformes de réseau social mais en cherchant à cadrer la volatilité des sujets et des interactions

La mauvaise réputation des réseaux au niveau universitaire a fait que certaines régions ou des États ont décidé d’interdire par la voie légale les réseaux sociaux qui permettaient d’entretenir des liens entre enseignants et étudiants (La loi n°54 du Sénat américain, qui est entrée en vigueur le 28 août 2011, précise que tout contact privé entre un professeur et un de ses étudiants par le biais d’un site Internet, quel qu’il soit, sera proscrit. Les professeurs pourront toutefois créer des pages publiques accessibles à tous. 20minutes.fr, août 2011)

Or que constatons-nous ? C’est aux États-Unis qu’est née la plateforme de réseau social Edmodo, ressemblant à s’y méprendre à Facebook par son interface conviviale simple et bleutée mais désormais dédiée au seul usage des pédagogues, des élèves et même de leurs parents, qui peuvent suivre, grâce à un code spécial d’accès, l’évolution cognitive de leur progéniture. Pour les distinguer des plateformes d’enseignement à distance de type traditionnel, nous pouvons nous baser sur l’identification de Cachia (2008) qui énumère six caractéristiques des sites de réseautage social : la valorisation du profil utilisateur (selon lequel l’utilisateur se présente à la communauté) ; l’externalisation des données (réseaux de contacts, historique des contributions) ; l’émergence de nouveaux modes d’extension de réseaux (mise en  contact des utilisateurs par  similitudes de goûts) ; des activités « bottom-up » (les utilisateurs influencent le contenu) ; la facilité d’utilisation et la réorganisation de la géographie d’Internet.

Dans ce contexte, est né le projet de recherches intitulé « La médiation informationnelle  au travers de plateformes de réseaux sociaux : L’application de Facebook à l’enseignement du français langue étrangère » suivie en co-tutelle par l’université de Rouen (FR) et l’université de Phuket (TH).

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